
Une école de village sauvée grâce à Montessori
Vous pourrez lire ci-dessous un formidable témoignage de Madame le Maire de Blanquefort sur Briolance qui, avec les élus de la Commune de Gavaudun, a réussi non seulement à éviter la fermeture de son école publique mais aussi à la développer et également à attirer des habitants sur sa Commune et ainsi à voir l’ouverture de nouveaux commerces et sa population augmenter considérablement. Et ceci grâce à son choix de mettre en place la pédagogie Montessori au sein de cette école publique et grâce au dynamisme de l’équipe enseignante de cette école.

J’ai eu la chance de participer à ce formidable projet en assurant la formation Montessori ainsi que le suivi de cette merveilleuse équipe et je suis extrêmement heureuse des bienfaits qu’a entraîné ce choix de rendre Montessori accessible à tous les enfants puisque cette école est restée publique.

J’avais précédemment participé à un projet identique sur une Commune de Dordogne, Tursac et d’autres projets sont également en cours sur d’autres Communes de France.
Tout le monde sait qu’un des objectifs de ma vie est de rendre accessible la pédagogie Montessori à tous les enfants de France et je pense que c’est un des moyens de l’atteindre.
Je suis bien sûr à la disposition de tous les élus qui souhaitent mettre en place ce même genre de projet afin d’éviter la fermeture de leurs écoles.

Sylvie d’Esclaibes
Témoignage de Sophie Gargowitsch
“En mars 2014, notre équipe est élue. Dans notre programme de campagne, nous avions insisté sur l’importance de mener le combat pour maintenir notre école rurale au sein de notre commune de Blanquefort sur Briolance.
Conscients que les effectifs avaient plutôt tendance à baisser, faute de nouvelles familles et une ambiance économique morose. Nous devions donc proposer un développement différent pour notre commune et avons rédiger un projet global s’appuyant sur les 3 socles du développement durable: social, environnement et économie.
Nous savions que cette promesse de campagne était un challenge difficile à relever mais savions aussi que notre village, fort de cette unité humaine en était capable… il suffisait de trouver le moyen… à cet instant, nous savions que 3 postes d’enseignant était un luxe qui ne durerait pas. Tout autour de nous- nous assistions à la mort de nombreuses écoles rurales, et ce, malgré la mobilisation important des familles, des élus et des enseignants. Les banderolles n’étaient pas une solution gagnante…

Dans ma vie privée, j’avais rencontré la méthode de pédagogie active Montessori, et tout au fond de moi, j’étais convaincue que cette méthode pourrait être une expérience extraordinaire pour nos enfants dans le public, revenir à l’essentiel, l’enfant et son apprentissage … il me fallait maintenant convaincre mon conseil municipal, et leur demander l’autorisation de proposer le projet aux enseignantes puis au ministère. Nous savions que la tâche serait délicate mais nous devions essayer et ils m’ont fait confiance.
Avec du recul, cela semble couler de source- réintégrer les pédagogies actives au sein de l’instruction de nos enfants, mais à ce moment là, ce n’était pas le cas, et pour en avoir discuté avec mes collègues maires, j’ai bien compris que ce serait très difficile….
Notre grande chance fut que nos trois enseignantes m’ont fait confiance, et ont accepté de relever le défi gigantesque dans lequel nous allions nous lancer…

Après plusieurs courriers, appels téléphoniques, j’obtiens enfin un rendez-vous au ministère en octobre 2015… ne pensant pas recevoir une réponse affirmative, nous n’étions pas vraiment prêts à présenter notre projet.
Me voilà à Paris, je présente le projet que nous avons rédigé avec une des enseignantes du RPI. À la suite de cette rencontre, j’ai un sentiment mitigé, ce sentiment de ne pas avoir été à la hauteur de la mission, mais je garde l’espoir me sachant soutenue et épaulée par mes trois drôles de dames ( les 3 enseignantes). Je garde en tête le risque que je leur fais prendre aussi, ne subiront-elles pas de pressions? leur courage et leur audace seront-ils brimés ? Je me résonne et je serai celle qui devra prendre les coups, c’est moi qui les ai embarquées dans ce navire…
Sur le trajet du retour, dans le train, je relis ce projet, j’y crois tellement… rien n’est impossible… pour preuve, notre école de Blanquefort sur Briolance abrite dans ses murs, l’âme de ces pédagogies actives, comme Freinet utilisée dans les années 50… il n’y a pas de hasard…
Les jours passent, pas de nouvelles, décembre … toujours rien… puis en janvier, un courrier de Monsieur le Recteur, dans lequel, il fait allusion à mon intervention auprès de Mme le Ministre, et me joint un dossier pour la création d’une école privée Montessori.
À la lecture, je bouillonne de colère… ils n’ont rien compris… la patience n’étant pas une qualité chez moi, je réitère ma demande au ministère en fustigeant ce courrier du recteur qui ne semble pas comprendre le dossier. Le recteur sera destinataire de la copie de cette correspondance.
La réponse de la cheffe du cabinet de Mme le Ministre ne tardait pas, et enfin un encouragement…L’expérimentation était acceptée, mais le ministère ne prenait pas en charge la formation des enseignantes . Qu’à cela ne tienne, après en avoir discuté avec mon collègue Maire de Gavaudun, et nos conseils municipaux respectifs, nous prenons la décision de financer les formations des trois enseignantes et de Marlène, l’Atsem.
Celles-ci se sont formées sur leur temps libre, et Sylvie d’Esclaibes a transmis cette passion dont elle seule a le secret… j’avais un retour enthousiaste de tout ce qu’elles apprenaient et comment elles le mettraient en place dans leurs classes. Ne manquait plus qu’à trouver les fonds nécessaires

Alors nous avons lancé un financement participatif via la plateforme Ulule et avons rassemblé la somme de 5.300 eur, une association parisienne nous a versé la somme de 6.500 eur.
Tout l’été 2016, les enseignantes ont organisé des journées travaux, les parents y ont participé avec enthousiasme… ce projet devenait le projet de tous! Du pur bonheur. Aucun parent n’a eu de doutes, et à notre grande surprise dès la rentrée de septembre 2016, quelques familles sont venues s’installer sur la commune.
J’ai tendance à dire, des valeurs ajoutées … puis les médias ont commencé à en parler, et d’autres familles arrivèrent, tellement bien que les biens immobiliers vacants trouvaient acquéreurs… À ce jour, notre population a augmenté de 16%, ce qui est énormissime pour un petit village. Cette augmentation a permis aux activités locales de se développer… la création d’une boulangerie bio avec four à bois, l’arrivée d’une gynécologue, d’un ostéopathe et bien d’autres leviers de dynamisme.
Nos prévisions pour septembre 2018, nous accueillerons 92 enfants, et avons la chance d’ouvrir une nouvelle classe.
Le seul point que nous n’avions pas mesuré: la demande croissante.
En conclusion, cette incroyable histoire n’aurait jamais été possible si les enseignantes n’avaient pas osé l’aventure. Je les remercie toutes les 4 ( j’inclus Marlène ) pour leur confiance, leur dévouement auprès des enfants, leur force et leur joie de transmettre. Les élus de nos deux communes d’avoir accepté de relever le défi incroyable de sauver l’école malgré les critiques. Les parents pour avoir accepté le changement de méthode …. et puis surtout les enfants … quel bonheur de les voir arriver à l’école en courant, le sourire aux lèvres, et si fiers de me montrer tout ce qu’ils savent faire…
Sans oublier, notre incroyable inspecteur éducation nationale de la circonscription, sans qui nous aurions à surmonter des difficultés administratives supplémentaires. Son accompagnement est précieux et nous permet de prolonger cette transformation…
Sophie Gargowitsch”