L’article ci-dessous me paraît tellement juste. Le système traditionnel génère le pessimisme, la tristesse et le manque d’enthousiasme chez les enfants surtout au niveau du collège et du lycée.
Encore la semaine dernière, lors d’une conversation, un élève issu du système traditionnel – établissement catholique sous contrat – m’expliquait que notre établissement devait avoir un mauvais niveau parce que cet élève avait une moyenne de 12 dans son précédent établissement alors que chez nous, en travaillant tout autant, il avait 18.
Pour moi, lorsqu’un élève travaille bien, il doit avoir 18. Ce qui est très surprenant, c’est que ce type d’élève et ses parents donnent raison aux établissements qui plafonnent les résultats à 12 ou 13. J’ai pourtant souvent remarqué que, lorsque les élèves de terminale soumettent leur dossier scolaire à des établissements étrangers, ils ne sont pas admis avec des 12 ou 13 alors que ce sont de très bons élèves. Mais cela c’est l’esprit français. Les parents préfèrent les établissements qui limitent et contraignent leurs enfants. Comment, un élève peut-il avoir confiance en lui et en ses capacités en ayant des notes plafonnées à 12 ou 13 ?
Les établissements scolaires qui stressent les enfants en leur mettant une énorme pression (totalement inutile) ont des listes d’attente alors que l’on sait très bien que ce type de pédagogie provoque des dépressions, des phobies scolaires (de plus en plus nombreuses), de nombreux cas d’anorexie voire même de suicide… et en tout état de cause des jeunes qui perdent l’enthousiasme d’apprendre et d’être heureux d’aller à l’école.
Et sans parler des élèves soit disant en « échec scolaire » qui collectionnent des mauvaises notes, des punitions, des humiliations en public, etc… Comment ceux-là pourraient-ils être optimistes ? D’autant plus que comme le dit si bien l’article, les enseignants s’arrêtent à la mauvaise note, sans redonner une chance à l’élève, sans essayer de lui expliquer différemment et surtout sans se remettre en question.

Dans notre établissement, les élèves ont toujours des chances supplémentaires s’ils n’ont pas bien appris une leçon ou pas réussi à faire un devoir. Les professeurs sont prêts à donner davantage pour que le jeune comprenne ce qui lui est demandé. Des techniques différentes peuvent être adoptées pour aider les élèves à progresser et surtout à prendre confiance en eux.
De plus, j’essaie toujours de favoriser par tous les moyens l’acquisition de la confiance en eux et en leur avenir. Combien d’élèves arrivent en me disant : « les professeurs m’ont dit que je ne ferai jamais rien de ma vie », « que je suis un bon à rien », « que je ne pourrai jamais réaliser mon rêve », « qu’il ne faut pas que je choisisse cette voie car je ne trouverai pas d’emploi », etc…
Comment peut-on casser les rêves des jeunes comme ça ? Comment imaginer qu’ils seront plus tard des adultes optimistes ?
Pour ma part, je leur explique toujours que s’ils ont un rêve, une passion, ils réussiront forcément et tout sera possible pour eux.
Une jeune adolescente d’une école très bien cotée de l’ouest parisien s’est retrouvée en phobie scolaire grave après que les professeurs de cet établissement lui ont expliqué qu’elle ne pourrait jamais exercer le métier dont elle rêvait depuis son plus jeune âge parce qu’il lui fallait passer par une section S et qu’elle en était incapable.
Comment peut-on dire des choses pareilles à des jeunes ? Surtout lorsque l’on sait que dans d’autres pays, certaines filières sont tout à fait possible sans un bac scientifique.
Comment un jeune dont on a cassé les rêves peut-il devenir un adulte optimiste ?
Sylvie d’Esclaibes
“Pessimisme français : la faute à l’école ?

Et si le pessimisme bien connu de nos concitoyens était dû à un système scolaire qui sélectionne par l’échec ? C’est une hypothèse retenue par l’économiste Claudia Senik. Interview.
Les Français apprennent-ils le spleen en même temps que les maths et l’histoire-géo? (Antoine Arraou/AltoPress/MaxPPP)
Dans tous les classements internationaux, les Français voient la vie en gris. Croyant moins en l’avenir que leurs voisins, ils sont convaincus que pour eux-mêmes aussi, “demain” rime avec “moins bien”. Mais pourquoi le pays de Rabelais et Coluche fait-il tant la gueule ? Claudia Senik, professeure à l’Ecole d’économie de Paris, s’est penchée sur la question et émet une hypothèse, qui mérite réflexion : notre maussaderie serait enseignée sur les bancs comme les maths et l’histoire-géo. Explications.
Les Français sont-ils vraiment moins heureux que leurs voisins européens ?
– Claudia Senik Quand on leur pose la question, ils déclarent un niveau de bonheur en effet moins élevé. La probabilité qu’un Français se dise “très heureux” est ainsi inférieure de 20% à la moyenne des citoyens européens. Nous sommes pessimistes sur l’avenir du pays et du monde, mais aussi quand la question nous concerne personnellement : suis- je plutôt heureux ou malheureux ? Ma situation matérielle va-t-elle s’améliorer ? Suis-je optimiste quant à mes perspectives personnelles ? A cela, nous répondons toujours de la manière la plus négative, quel que soit notre revenu ou notre âge. Même les Français expatriés répondent presque aussi négativement ! Une preuve que c’est bien un trait culturel.
A propos de vos travaux, le “New Yorker” écrit que les Français sont “heureux d’être malheureux“. Y a-t-il une forme de complaisance à gémir sur notre sort ?
– Je dirais plutôt qu’il est culturellement mal considéré en France de paraître trop optimiste : on se moque beaucoup des Américains souriants et de leurs “That’s great ! Wonderful !”, parce que nous sommes la civilisation du doute et de l’esprit critique. Un Français ressent une certaine fierté à conserver de la distance vis-à-vis des choses – une manière de dire : “On ne me la fait pas”. Je crois aussi, avec le philosophe Pierre-Henri Tavoillot, que c’est une façon de remplir un vide laissé par la mondialisation : comme ce phénomène nous angoisse, que nous n’avons aucune prise sur lui, nous préférons dire “tout va mal se passer” pour nous donner l’impression de dresser un pronostic, donc de maîtriser un peu l’avenir. Mais cela a un effet dévastateur, car plus nous anticipons négativement les choses, moins nous avons confiance en nous et moins nous parvenons à nous adapter.
Vous émettez l’hypothèse que le spleen français viendrait de notre système scolaire…
– C’est une interprétation possible. L’école est censée valoriser les compétences les plus diverses : le raisonnement logique, la créativité, la capacité à entreprendre, à travailler en équipe… Or, l’école française sélectionne sur un nombre très restreint de qualités – en gros, le français et les mathématiques. Elle sélectionne par l’échec une élite trop étroite. Et son système de notation est probablement plus sévère que chez nos voisins. Les petits Français devenus adultes n’ont guère développé l’estime d’eux-mêmes s’ils ont plafonné à 10 ou 12 durant toute leur scolarité… Quand un enfant échoue à une dictée, il ne faudrait pas se contenter de le sanctionner, mais lui faire refaire l’exercice. Pour qu’il perçoive qu’il peut progresser.
Propos recueillis par Arnaud Gonzague – Le Nouvel Observateur
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