Lorsque Philippe a eu 6 ans, il suivait un programme de CP au Lycée International Montessori (classe 6–9 ans). Il apprenait à lire (pas mieux que les autres) mais était passionné par les sciences (le système solaire, le big bang, etc…), l’histoire et en particulier la civilisation égyptienne.
Il posait déjà depuis quelques temps beaucoup de questions sur des sujets très variés et souvent sur le sens de la vie, de la mort… Il était vraiment passionné par le matériel Montessori de
sciences, d’histoire ou de géographie, allant même jusqu’à effectuer certains jours toutes les séries de livrets sur ces matières et de les refaire plusieurs jours de suite.
Nous l’avons laissé faire car il est très important de respecter le rythme et les choix de l’enfant, encore plus chez un enfant qui manifeste une évidente précocité.
Philippe était assez remuant, pas très passionné par l’apprentissage de la lecture ou des maths qui, au demeurant, ne lui posaient pas de problèmes particuliers et son graphisme était loin d’être parfait.
Les professeurs l’ont orienté petit à petit et gentiment vers ces apprentissages…
Sa mère se demandait quand même s’il ne s’ennuyait pas en cours. Il n’en parlait jamais mais elle avait, comme nous, l’impression qu’il ne donnait pas le meilleur de lui-même. En même temps, elle avait très peur d’être une maman qui “pousse” son enfant par fierté par rapport aux autres ou par souhait qu’il réalise des choses qu’elle n’avait pas faite elle-même. Au fond d’elle, elle sentait bien que quelque chose n’allait pas.
Son désir ayant toujours été, depuis sa naissance, de donner à son fils le meilleur pour son équilibre, sa confiance en lui et son bonheur, sa maman s’inquiétait de lui trouver parfois un comportement original. C’est pour cette raison qu’elle décida un jour de prendre rendez-vous avec une psychologue afin de mieux le comprendre. Cette psychologue décida de le tester et les résultats démontrèrent qu’il était un enfant dit “à haut potentiel” avec un QI de 150.
La psychologue conseilla alors de faire sauter à Philippe une classe afin qu’il se retrouve au minimum avec 1 an d’avance.
Sa mère prit donc rendez-vous avec moi pour parler de cette éventualité. Etant particulièrement vigilante par rapport aux enfants à haut potentiel, je sais qu’il ne faut pas laisser passer trop de temps avant de trouver des solutions. J’ai lu de nombreux ouvrages sur eux, je connaît leur fragilité et ne cesse de chercher le meilleur tout en sachant que rien n’est définitif avec ce type d’enfant et que ce qui convient pour l’un n’est pas forcément la solution adéquate pour l’autre.
Forte de ma longue expérience avec ce type d’enfants à haut potentiel dans l’école, je sais qu’il faut absolument s’adapter à chacun et être capable de réagir immédiatement si l’on sent le moindre problème d’ennui, agressivité, ou apathie, etc…
Je me tiens donc toujours à la disposition des parents, n’hésitant pas même à les contacter pour proposer un changement dans la situation scolaire de l’élève lorsque nous sentons, les professeurs et moi-même, que ce changement est nécessaire : pour certains, deux cours de sciences par semaine au lieu d’un prévu normalement, pour d’autres, deux cours d’histoire, etc… et cela même en cours de trimestre.
- Encore une passion de l’enfant précoce
Les élèves à haut potentiel aiment rarement approfondir l’expression écrite. Il peut donc être décidé de leur donner davantage de leçons dans cette matière quitte à ce que ce soit en cours particulier, ceci afin de bien leur expliquer ce que l’on attend d’eux. Pour d’autres, parce qu’on sait qu’ils sont souvent passionnés par les sciences, on leur donne la possibilité d’assister à des cours de physique même si ce n’est pas avec leur classe habituelle et dans un niveau largement supérieur à celui de leur âge. Tous les aménagements sont possibles.
- Le matériel Montessori de sciences
Pour en revenir à Philippe, ses parents et moi-même décidâmes qu’il suivrait tout de suite un programme de CE1 en mathématiques et en français. Les professeurs l’ayant laissé avancer à son propre rythme dans les matières scientifiques, il était dejà très en avance dans les programmes. On lui proposa donc du matériel scientifique adapté aux enfants plus âgés. En histoire, son professeur lui donna à lire des livres destinés à élargir encore ses connaissances et lui suggéra des visites de musées, d’expositions, etc… Philippe travaillait très peu mais avec des résultats très corrects et les félicitations sur tous ses bulletins scolaires.
Encore une fois, pour éviter l’ennui chez Philippe, je proposai à ses parents, lorsqu’il arriva à 8 ans en classe de CM1, de débuter l’apprentissage du chinois et de l’espagnol. Cela semblait bien lui convenir car, dans son apprentissage de plusieurs langues, il n’apprenait pas seulement le vocabulaire et la grammaire mais aussi toute la culture qui l’accompagne (histoire, géographie, habitudes culinaires, etc…).
En effet, je propose souvent aux parents d’enfants à haut potentiel d’élargir le champ d’apprentissage et de bien varier les activités afin de garder leur intérêt éveillé. C’est primordial afin qu’ils n’avancent pas trop vite en mathématiques et en français ou bien pire encore qu’ils ne s’ennuient en perdant tout attrait pour l’étude avec toutes les manifestations négatives que cela suppose (apathie, turbulence, etc…).
Ces enfants à haut potentiel aiment également avoir des contacts avec davantage de professeurs car ils sont souvent très intéressés par la rencontre de gens différents avec toujours cet appétit de satisfaire leur grande curiosité.
Je trouve très important de ne jamais tarir ce besoin d’apprendre. Au contraire, il faut répondre à cette soif en proposant des champs d’activités multiples et variés afin de toujours stimuler ce besoin. Il est important aussi pour les parents qu’il n’y ait aucune jalousie de la part des camarades et, au contraire, plutôt de l’admiration. Dans ma pédagogie, l’accent est mis sur l’acceptation de chacun avec ses différences, que ce soit un niveau intellectuel plus élevé ou moins élevé, une autre culture, un don particulier pour la musique, etc…
Un problème se posa avec Philippe : il n’avait pas beaucoup d’amis, comme c’est souvent le cas des enfants précoces. En effet, ceux-ci se retrouvent souvent trop jeunes au milieu d’enfants plus âgés qui ont des préoccupations bien différentes des leurs. C’est pourquoi je proposai que Philippe étudie les langues dans plusieurs groupes différents, ce qui lui permit de faire connaissance avec plus d’élèves et de trouver ainsi plus facilement des amis.
Il avait heureusement une excellente relation avec ses professeurs. C’est très important car ceux-ci doivent être très vigilants avec les enfants dits à haut potentiel. Il est indispensable qu’ils comprennent bien ces enfants, qu’ils dialoguent avec eux, qu’ils les acceptent tels qu’ils sont et les aident à donner le meilleur d’eux-mêmes car le risque est très grand de voir ces enfants plonger dans un échec scolaire irrémédiable.
Il faut dire que, dans mon école, je tenais absolument à mélanger toujours plusieurs enfants à haut potentiel avec des enfants dits normaux dans une même classe. Il est en effet très important pour ces enfants d’apprendre à vivre avec les autres car ils doivent s’adapter à tous et doivent se mesurer à l’école avec toute la diversité de la société.
Philippe a maintenant 12 ans. Il poursuit tranquillement sa scolarité sans trop se fatiguer, très heureux et confiant, gardant toujours sa soif d’apprendre sur tous les sujets, ceci jusqu’en milieu de 4ème où les professeurs et moi-même sentîmes qu’il ne semblait plus donner le meilleur de lui-même..
Je demande un rendez-vous à ses parents afin de voir avec eux ce qui pourrait le stimuler à nouveau dans ses études. Je leur propose de passer directement Philippe en 3ème puisqu’il est suffisamment mûr pour comprendre la littérature.
J’insiste néanmoins sur le fait qu’il devra rattraper le programme de mathématiques afin de ne pas avoir de lacunes. Il aurait donc alors 2 ans d’avance. Après en avoir parlé avec lui, nous décidons de le passer en 3ème en cours d’année. Il suit alors sans problème, toujours sans travailler énormément, en étant le meilleur de la classe.
Arrive le Bac. Philippe choisit la série S – spécialité Sciences et Vie de la Terre, bien sûr – avec chinois en option. Il réussit facilement l’examen avec une mention assez bien (13,31) et se retrouve alors à 15 ans avec le bac S en poche. Que faire ?
J’envisage plusieurs solutions avec Philippe et ses parents : il pourrait partir à l’étranger apprendre des langues, mais il parle déjà couramment anglais et espagnol et il est vraiment très jeune pour partir seul. Il pourrait commencer ses études supérieures mais il semble manquer de maturité pour affronter ce nouveau monde et cela lui fait peur. Je propose donc à ses parents de lui faire préparer un deuxième bac dans une autre section. Cela lui permettra de prendre un an de maturité, de connaître une autre matière très importante, l’économie, et de s’améliorer encore en langues afin de préparer d’autres examens de type Proficency de Cambridge, niveau intermédiaire de l’Institut Cervantès, Toefl, etc…
Ses parents décident en accord avec lui qu’il fera une autre terminale spécialité Economique et Sociale. Il passera aussi des examens variés car il adore cela. Il passe donc une année exceptionnelle au cours de laquelle il continue à s’intéresser à tout, prend beaucoup de maturité, et se sent finalement prêt pour envisager d’intégrer les études supérieures.
Il réussit son bac ES avec mention très bien. Nous l’aidons à présenter un dossier pour entrée en prépa économique dans un lycée prestigieux et un autre dossier pour l’université Paris Dauphine.
Il est accepté dans les deux mais son choix se porte vers Dauphine. En effet, il préfère acquérir une licence de gestion puis tenter le concours d’entrée en deuxième année dans les meilleures écoles de commerce.
- Ecole Supérieure de Commerce de Paris
Après avoir obtenu sa licence de gestion puis le diplôme de l’Ecole Supérieure de Commerce de Paris (ESCP-EAP), il occupe aujourd’hui, à 24 ans, un emploi de cadre dans une entreprise française spécialisée dans le luxe.
Je suis fière d’avoir permis à Philippe, ainsi qu’à beaucoup d’autres enfants précoces scolarisés dans mon école, de s’épanouir grâce au respect de leur différence (par exemple, Philippe, très jeune, écrivait très mal), de lui avoir permis d’optimiser au maximum son potentiel (choix sans limite des apprentissages), n’hésitant jamais à aller au-delà des apprentissages prévus au programme pour répondre à ses besoins. J’ai fait en sorte de respecter son rythme (sauts de classe quand nécessaire, mais aussi possibilité de passer deux baccalauréats) en réagissant toujours très rapidement, au fur et à mesure de sa croissance, pour lui donner ce qui lui convenait le mieux. Comme pour les autres, j’ai toujours eu à cœur de respecter sa personnalité et surtout de ne pas essayer de le faire rentrer dans un “moule”.
La réussite d’un enfant à haut potentiel est totalement liée aux relations étroites entre les parents, les dirigeants et les professeurs de l’établissement scolaire. En effet, cet enfant doit être suivi de très près par les trois parties afin que jamais il ne s’ennuie, que jamais il ne déprime… On doit toujours l’aider à donner le meilleur de lui-même, être attentif à répondre à toutes ses interrogations (qui peuvent paraître parfois très infantiles) et être capable de réagir très rapidement à un besoin de changement, que ce besoin de changement soit exprimé ou non. Ces enfants ont une sensibilité exacerbée et il faut donc être particulièrement vigilant.
- Un parcours scolaire épanouissant
Ajoutons que chez ces enfants doués d’un potentiel intellectuel exceptionnel, la réussite scolaire et sociale est loin d’être la règle. Un QI élevé n’est pas un gage de réussite dans la vie. Selon les statistiques de l’AFEP (association française des enfants précoces), environ 33% de ces enfants sont, à la fin de la 3ème, bons ou brillants élèves, 33% d’entre-eux sont en échec scolaire total et 33% sont moyens ou médiocres. Au total, plus de la moitié des enfants à haut potentiel ne feront pas d’études du tout ou feront des études sans rapport avec leurs capacités exceptionnelles.
Une grande attention, une grande vigilance ainsi qu’une perpétuelle remise en question, un bon équilibre affectif, familial et social, toutes ces choses sont essentielles de la part des adultes pour permettre le plein épanouissement des enfants dits à haut potentiel.
Sylvie d’E.
J’ignore si l’école que j’ai fondée en 1995 en Belgique (Schola Nova) peut donner des réponses satisfaisantes, mais vu que beaucoup d’enfants précoces y ont magnifiquement fleuri, peut-être pourrez-vous y puiser quelques idées… Bonne chance!
Ou peut on vous rencontrer?
Nous habitons à cannes et avons un enfant de 5 ans qui rencontre des difficultés à l’école, la Maitresse nous a alerté car il tape sur ses camarades, n’obéit pas aux consignes, etc…
Il passe ainsi puni la moitié de ses journées à l’école. A la maison il a du mal à accepter la frustration, répond en criant, mais peut rester tranquille en jouant, regardant des émissions, écoutant de la musique. Il est très actif physiquement
Nous avons contacté plusieurs psychologues qui nous affirment qu’il n’a pas de problème d’agressivité, Ni d’hyper activité, mais qu’il aurait un haut potentiel. Il n’a pas été encore teste.
Pensez vous que montessori serait approprié à un tel profil?
Merci d’avance
Ana