La grammaire

La grammaire

Je suis tout à fait d’accord avec l’article ci-dessous qui est paru dans le Huffington Post le 25  janvier dernier. En effet, je constate tous les jours dans ma classe d’élèves du CP au CM2 que les enfants très jeunes peuvent tout à fait comprendre ce qu’est un complément d’objet direct, indirect et un complément circonstanciel. Alors pourquoi encore simplifiez les choses ? C’est vraiment prendre tous ces élèves pour des imbéciles.

Dans notre classe Montessori, nous présentons à nos élèves dès l’âge de 7 ans (parfois plus jeune), un matériel très clair qui permet aux enfants d’analyser la fonction des mots dans la phrase avec une rare facilité et ils trouvent tout de suite les compléments d’objets directs, indirects ainsi que les compléments circonstanciels. Donc moi aussi, je refuse d’enseigner ce prédicat, étape totalement inutile.

Même lors des formations Montessori pour les enfants de 6 à 12 ans, je réponds aux stagiaires que je refuse de présenter ce prédicat et que nous continuons à présenter les fonctions comme avant puisque les élèves les comprennent très bien.

De plus les élèves aiment beaucoup analyser les phrases de cette façon, alors pourquoi les en priver ?

Montessori grammaire
L’analyse des fonctions dans une phrase réalisé par Joël Philippin

Vous trouverez sur les illustrations ci-dessous des photos de ces tableaux. Il suffit ensuite de faire écrire ou recopier une phrase sur une bande de machine à calculer, demander ensuite à l’élève de découper le verbe et de le déposer sur le disque rouge, et ensuite de poser toutes les questions à partir de ce verbe :

  • qui est-ce qui et qu’est-ce qui ? leur permet de trouver le sujet qu’il découpe et pose sur le disque noir
  • qui, quoi ? leur permet de trouver le complément d’objet direct, de le découper et de poser le groupe de mots en question sur le disque noir
  • à qui, à quoi ? de qui ? de quoi ? leur permet de trouver le complément d’objet indirect, de le découper et de le poser sur le disque noir
  • en enfin toutes les questions : où, quand, avec qui, pourquoi, comment, à cause de quoi ? dont ils trouveront, s’il y a lieu, la réponse dans le reste de leur phrase et ainsi de le découper et le déposer sur les disques orange qui leur donnera les compléments circonstanciels avec leur nature (lieu, temps, accompagnement, cause, manière, etc…).
Montessori grammaire
Tableau d’analyse des fonctions.

Quoi de plus simple ?

Arrêtons de sousestimer les enfants ! Ils sont au contraire capables de beaucoup si on leur offre le matériel et sa présentation adaptés.

Je viens d’écrire un livre sur le français pour les 6 – 12 ans où toute la grammaire (ainsi que l’orthographe, la conjugaison, le vocabulaire et l’expression écrite) sont très bien expliqués et permettent à tous d’expliquer la grammaire facilement aux enfants. Il s’appelle “le français pour les 6 – 12 ans” et il est publié dans la collection “Pas à Pas” de l’Ecole Vivante. 

Sylvie d’Esclaibes

Professeurs de français, nous n’enseignerons pas le prédicat

Puisque nos inspecteurs nous parlent beaucoup de “simplification”, qu’on nous permette de simplifier notre pensée à ce sujet : nous nous sommes engagés à ne pas prendre nos élèves pour des imbéciles.

25/01/2017 14:27 CET | Actualisé 25/01/2017 15:00 CET

CAIAIMAGE/CHRIS RYAN VIA GETTY IMAGES
Professeurs de français, nous n’enseignerons pas le prédicat. Illustration.

“Lorsque nous avons passé le CAPES ou l’Agrégation, nous n’avons pas prêté serment. Nous n’avons pas juré, la main levée, que nous consacrerions notre entière volonté, notre intelligence et nos savoirs à la réussite des enfants et des adolescents que l’on nous confierait. Nous n’avons pas juré, mais c’est tout comme. Dès le moment où nous avons commencé à enseigner, dès le premier jour où une trentaine de regards se sont fixés sur nous, nous avons considéré l’immense responsabilité qui était la nôtre, et nous l’avons acceptée totalement.

Nous nous sommes engagés à respecter leur intelligence. À leur prodiguer le meilleur d’une langue somptueuse et délicate, ardue mais pas inaccessible. À équilibrer sagement et autant que possible ce qu’ils doivent savoir, avec ce qu’ils peuvent acquérir et ce que nous croyons nécessaire. Nous nous sommes engagés à jongler quotidiennement avec les réalités d’un métier devenu fou, d’horaires disciplinaires étrillés par le concert des réformes, des TPE, des IDD, des EPI, d’une éducation parentale défaillante, et d’une éducation nationale agonisant sous le poids de l’ego de spécialistes auto-proclamés.

Nous nous sommes engagés à les mettre à l’épreuve, à les confronter aux mille difficultés de la lettre, du mot, de la proposition, de la phrase, du paragraphe, du texte, de la page, du livre. À leur faire traverser les bosquets des préfixes et des suffixes, les haies du participe, les champs des compléments d’objet. À les tenir par la main quand ils hésitent entre le chemin de l’épithète et celui de l’attribut. À passer sans crainte devant les épouvantails du subjonctif et des conjonctions. À ne pas trébucher sur les complétives, les circonstancielles, les participiales et les infinitives. À flâner entre les prépositions et les propositions. À chercher, scruter, analyser, avec eux. À exposer, à éprouver, à définir. À mettre des noms sur des réalités, et sur ces réalités des certitudes et des clartés qui nous conduisent ensemble, parfois, au Verbe dont Hugo nous disait qu’il était Dieu.

Nous nous sommes engagés à les respecter, tout court. Et puisque nos inspecteurs nous parlent beaucoup de “simplification”, qu’on nous permette de simplifier notre pensée à ce sujet : nous nous sommes engagés à ne pas prendre nos élèves pour des imbéciles. À ne pas partir du principe qu’ils ne sont pas capables de comprendre ce que des milliers d’enfants de France et d’ailleurs ont pu et su saisir avant eux.

Nous nous sommes engagés à ne pas les mépriser, donc. Et à croire, malgré la condescendance des discours égalitaristes qui s’abattent sur leurs jeunes épaules – et qui voudraient encore se faire passer pour de la bienveillance ! – que Nesrine, Djibril, Anaïs, Yacine, Diane, Marc, Sélya, Pierre et tous les autres ont en eux les ressources pour s’abreuver à la source exigeante et magnifique d’une grammaire qui pourrait être, encore, une chanson douce, si on voulait bien laisser en paix, une fois pour toutes, ceux qui cherchent patiemment, quotidiennement, à la transmettre.

Nous n’enseignerons pas le prédicat. Nous n’en parlerons même pas à nos élèves. Mais nous en parlerons à vous, membres du CSP, sectateurs du Grand Rien, pédagogues du Vide, fantoches dispensateurs de formations niaiseuses… Nous n’avons pas attendu vos divagations pour découvrir qu’on enseigne la règle générale avant l’exception. Nous ne les avons pas attendues pour constater, réforme après réforme, déclaration ronflante après déclaration ronflante, que décidément, vous avez du mal avec l’ambition et l’exigence.

Nous continuerons donc de faire ce qui marche encore dans nos classes, ce qui a encore du sens, ce qui a été éprouvé, et ce que vous aimeriez tant faire oublier, parce que cela vous donne cent et cent fois tort. Nous continuerons de donner à nos élèves ce qui les fait grandir : des règles de morphologie, de grammaire, d’orthographe, de syntaxe. Nous continuerons de leur apporter ce qui fonctionne parce que c’est vrai, et que nous aurons du temps pour que ce qui était nôtre devienne leur : ce savoir qui se fait découverte, et qui, de découverte, devient pour eux savoir.

Nous continuerons, parce qu’il n’est rien d’aussi beau que ce moment où un élève, concentré, attentif, les yeux brillants, s’aperçoit qu’il a compris, qu’il a retenu, et qu’enfin il a fait. Gardez votre prédicat, nous garderons nos compléments d’objet, directs et indirects, nous enseignerons l’accord du participe passé, nous défendrons pied à pied cette langue qui nous est chère parce qu’elle est notre mémoire et notre avenir. Nous conserverons cette langue vivante pour qu’elle continue de nous donner, par une grâce qu’aucun de vos programmes insensés n’a su abolir, des Molière et des Céline, des Senghor et des Yourcenar, des Giraudoux et des Camus. Et si désormais, vos prescriptions pédagogiques, nous les dédaignons, surtout, n’en prenez pas ombrage : ce n’est jamais, après tout, qu’un COD placé avant le verbe.”

4 commentaires sur “La grammaire

  1. Je trouve cela dramatique de simplifier à mauvais escient, de tronquer, d’effacer notre langue à petit feu, sous de mauvais prétextes. Le prédicat ?! mais cela ne veut rien dire ! si ! on met tout dans le même sac et puis on se débrouille ! A la seule différence qu’une fois la logique des compléments acquise elle peut s’avérer utile dans d’autres langues étrangères. Par exemple en Allemand, la différence entre un COD ou un COI/COS se montrera dans la plupart des cas par un Akusativ ou un Dativ, avec quelques exceptions, mais le plus souvent on ne se trompe pas ! Tout comme l’ordre des compléments lors de la construction d’une phrase…

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