Toucher pour apprendre

Vous lirez dans cet article du Figaro paru le 25 décembre ce que Maria Montessori avait déjà découvert il y a un siècle et que nous mettons en œuvre avec succès au Lycée International Montessori Athéna depuis plus de 20 ans.

Montessori - le toucher
La main outil essentiel dans les apprentissages.

J’ai écrit précédemment de nombreux articles sur l’importance du toucher pour les enfants de maternelle. Vous pourrez lire : « les bénéfices de l’apprentissage multi-sensoriel« ,  « le matériel sensoriel dans la classe Montessori »,  « comment apprendre à lire à votre enfant dés son plus jeune âge ».

La photo ci-dessous me rappelle avec jubilation une de mes filles qui retournait gaiement sur sa tête son assiette de pâtes. C’est la même qui aujourd’hui réussit ses études supérieures de façon assez exceptionnelle après avoir manifesté une grande précocité dans tous les domaines.

Sylvie d’Esclaibes

« Actualité

                                                       MIKE KEMP / BSIP/MIKE KEMP / BSIP

Les bébés les plus «crasseux» sont aussi les plus performants pour reconnaître et nommer les aliments.

Les bébés, physiciens sur chaise haute

Les petits reconnaissent les matières autant que les formes, pour peu qu’ils soient autorisés à les toucher.

On a longtemps cru que les enfants apprenaient d’abord à nommer les objets qui ne changent pas de forme. Une erreur induite par les expériences en laboratoire, affirment trois psychologues américaines, dans une étude publiée dans Developmental Science . «Les bébés sont en fait bien plus malins que nous le pensions!», s’amuse Anne Christophe, spécialiste en sciences cognitive au CNRS.

On sait que l’on apprend mieux lorsqu’on est dans le «bon» contexte. Mais peu d’études avaient exploré cet effet du contexte dans l’apprentissage du langage. Lorsqu’on les teste en laboratoire, les bébés, le plus souvent installés sur les genoux de leur mère, semblent bien plus performants à reconnaître des objets «solides» comme des petites voitures, qui ont l’avantage de conserver la même forme qu’elles soient en fer ou en plastique. On en a déduit un peu vite que les bébés identifiaient les choses à leur forme et peinaient à appréhender les matières «mouvantes».

Pourvu que le contexte s’y prête

Or ces substances changeantes, c’est souvent à l’heure du repas que nos chérubins les rencontrent. Lynn Perry (université du Wisconsin), Larissa Samuelson et Johanna Burdinie (université de l’Iowa) ont donc voulu tester leurs cobayes dans les conditions où ils croisent d’ordinaire purée, compote ou fromage fondu. Elles ont présenté à 72 bambins de 16 mois, installés tantôt sur une chaise haute, tantôt à une table, 24 aliments qu’ils pouvaient tripoter à leur guise. Un nom inventé était attribué à chaque substance, qui devait ensuite être retrouvée mais sous une apparence différente, parmi d’autres habilement «déguisées» pour ressembler à la première. Où la mayonnaise devient rouge et le porridge vert…

Première surprise: les bébés ont reconnu les aliments malgré le changement d’apparence… à condition d’être assis sur une chaise haute, où ils étaient bien plus enclins à l’exploration. Seconde surprise: les plus crasseux étaient aussi les plus «performants»!

«Cette étude, explique Anne Christophe, nous montre que les enfants sont parfaitement capables d’apprendre ces mots évoquant des substances non solides.» Pourvu que le contexte s’y prête.

Sur les genoux de maman, ils s’attendent à jouer, et l’on ne joue pas avec de la soupe. Mais placés sur une chaise haute comme lors des repas, ils mobilisent plus aisément toutes les connaissances déjà acquises dans ce domaine et se sentent autorisés à toucher, sentir et goûter la nourriture.

Ils vérifient leurs hypothèses

Montessori lettres rugueuses
Manipuler des objets pour apprendre à lire.

«Ces moyens d’exploration sont essentiels pour apprendre des choses à propos des substances, expliquent les auteurs, car les signaux visuels peuvent être ambigus.» Imaginez-vous, redevenu bé­bé, face à deux verres remplis l’un de lait, l’autre de colle blanche. Comment les distinguer sans y tremper les doigts?

Montessori lecture
Toucher les lettres rugueuses pour apprendre à lire.

«Les petits comprennent mieux ce sur quoi ils peuvent agir. S’ils ne peuvent pas toucher un objet ni le transformer, cela ne les intéresse pas», explique Laurence Rameau, puéricultrice et directrice de la rédaction du Journal des professionnels de la petite enfance. «Ils fonctionnent comme des chercheurs, en émettant des hypothèses, puis en les vérifiant.» Lorsqu’un bébé renverse sa soupe, torture son Kiri ou crache sa compote à la figure de maman… «Ce ne sont pas des bêtises, mais des expériences!» insiste Laurence Rameau. Et s’il récidive après avoir été grondé? Une expérience on vous dit, que votre enfant doit, comme tout chercheur, renouveler pour vérifier que son hypothèse reste juste!

«Pour autant, cela ne veut pas dire qu’il faut les laisser jouer avec la nourriture», concède la puéricultrice. «Il faut accepter que l’enfant fasse une expérience, sans qualifier cela de bêtise, tout en lui expliquant que l’on n’est pas d’accord.» Et lui proposer sable ou pâte à modeler pour qu’il apporte sa pierre à la mécanique des fluides…

Toucher pour apprendre

Voir et entendre, mais aussi toucher, sentir et goûter… «De plus en plus de recherches suggèrent que l’approche multimodale serait plus efficace pour apprendre», explique Anne Christophe (CNRS). Et ça n’est pas vrai que pour les bébés. Édouard Gentaz, professeur de psychologie du développement à l’université de Genève, a ainsi montré comment des enfants de 5 ans apprenaient mieux à lire lorsque, en sus de la méthode classique (qui associe la vue et l’audition), on leur permettait de toucher des lettres en relief. Des idées déjà exprimées il y a un siècle par Maria Montessori… mais dont l’école française tarde à s’emparer! »

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